LES COULISSES DU LIVRE
La VEroom du livre.

Hier…
J’étais un alcoolique au dernier degré du supportable. Devenu sobre, au prix d’efforts insensés, je voulais aider à mon tour, exprimer les choses. Pour moi cet engagement relevait de l’utilité publique. J’étais prêt à aller au fond des choses, à ne rien occulter, à parler de ma reconstruction et des rechutes liées à un socle instable de la sobriété.
Je voulais raconter mon histoire et c’était pour la bonne cause. L’idée centrale c’était uniquement la transmission d’expériences. Je voulais dire aux autres : « Voyez, vous n’êtes pas seul, moi aussi j’ai été addict et je m’en suis sorti. » Il me fallait trouver quelqu’un pour m’aider à écrire, dépasser mes vingt premières pages et tout à la fin, trouver un éditeur. Bref, entrer dans un schéma classique.

Pendant…
Cadeau de la vie ! J’ai trouvé la bonne personne pour commencer ce travail d’écriture. Judith. Non seulement elle a adhéré mais elle a fait explosé ce projet de livre dans d’autres dimensions : psychanalytique, testimonial, curative.
Comme nous le disons dans « D’avoir trop trinqué ma vie s’est arrêtée », elle rêvait grand. Parfois même, je trouvais qu’elle rêvait trop grand pour moi.
En fait, on dépassait ensemble nos petits égos, nos intérêts. Si nous n’avions pensé qu’à nos gains, je n’aurais pas vidé mon compte épargne et Judith n’aurait pas bossé gratuit pendant deux ans. Chacun de nous a fait d’énormes sacrifices, des choix, des investissements. Ensemble, nous nous sommes effacés devant l’ampleur de la tâche. L’idée n’était pas et n’est toujours pas de faire parler de nous ou de poser nos deux noms sur une couverture. Non, l’idée qui soutend l’écriture de ces deux livres « Fragments d’alcool » et « D’avoir trop trinqué ma vie s’est arrêtée », c’est d’être les porte-paroles d’une cause commune : affronter nos maux pour en guérir et lutter contre l’addiction alcoolique. Parfois, ce fut très dur ! Mais nous avons toujours conservé notre ligne de conduite. Nous n’avons pas cédé au compromis. Pas cédé au ras-le-bol.

Pendant… c’était grandir, s’affirmer, se découvrir, être ! Tout ce qui sortait de mes tripes pendant les séances, je l’écoutais. Je faisais taire mes mauvaises pensées. J’écoutais ma petite voix qui m’invitait à poursuivre. Jour après jour, les bienfaits de l’écriture et de la LittéroThérapie s’exportaient dans le cercle familial, élargissaient les horizons de ma famille, de mes amis et les miens. De semaine en semaine je me connaissais mieux. J’explorais un continent : moi !

Demain…
Demain, c’est prendre des positions, construire ma vie autour de ce travail. Défendre cette cause est devenu ma nourriture, mon projet de vie professionnelle au travers de ma mission de Patient expert. Et comme le dit Judith : l’histoire n’est pas finie !
Afin de porter loin, haut et fort ce long et important travail, nous espérons des adaptations de « Fragments d’alcool » et « D’avoir trop trinqué ma vie s’est arrêtée » pour le théâtre, la TV ou le cinéma, la BD… tous médias capables de modifier en profondeur la perception que la société a de l’alcool. La « mission » est immense parce que le fléau l’est aussi. Il nous faudra bien ça pour commencer à faire bouger les mentalités. D’ailleurs, mais c’est en Off, nous travaillons sur la création d’un label destiné à soutenir tous ceux qui veulent améliorer leur relation à l’alcool. Nous vous en parlerons dans quelques semaines.

Pour toujours…
Baptiste et moi avons créé une relation en-dedans et au-delà du livre. Sur le papier tout nous séparait, l’âge (et je réclame la fin de cette ségrégation par l’âge), la classe sociale, l’éduction… Bref, si l’on a une vision restreinte des « possibles », notre relation d’amitié et de grande affection était impossible.
Dans les faits, Baptiste a trouvé une amie et moi un ami. Derrière l’objet livre que vous tenez entre vos mains, il y a deux humains, avec des émotions communes et des objectifs communs. Avec moi Baptiste a réalisé une master classe en littérature et en analyse. Avec lui, j’en ai fait une en terre d’alcoolisme et de détresse adolescente. Et grâce à lui, j’ai trouvé de merveilleuses raisons de transmettre.

De la LittéroThérapie à D’avoir trop trinqué ma vie s’est arrêtée en passant par Fragments d’alcool, avoir été alcoolique a changé le destin de Baptiste et le mien.

9 novembre 2020 (en plein second confinement Covid)